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Ne pas séparer ce que Dieu a uni


Aujourd’hui, la liturgie nous plonge dans la réalité la plus universelle et la plus intime qui soit : celle qui nous fait homme et femme, en particulier dans la vie du couple qui en est l’expérience la plus engagée. Il faudrait, pour la laisser résonner dans toute son intensité, entendre ceux qui, parmi nous, sont engagés dans le mariage et en vivent les joies, les fatigues et les espérances, mais ceux aussi qui ont rencontré l’échec et la souffrance de la séparation, et aussi ceux qui vivent en couple sans être mariés, jusqu’à celles et ceux qui se sentent attirés par un compagnon ou une compagne de leur sexe. Aussi, qui que nous soyons, mariés, veufs ou célibataires, jeunes ou moins jeunes, quel que soit notre état de vie, chacun de nous est aujourd’hui convoqué à entendre une question et une bonne nouvelle pour sa propre vie.


Il faut pour cela aller à la source. Vous avez entendu : au commencement, il y a l’acte créateur de Dieu. Dans le récit, symbolique bien sûr, de la Genèse est affirmée la réalité profonde de la vie de tout être humain : Dieu crée l’humain dans la différenciation, homme et femme, chacun dans son identité sexuée. Jubilation de Dieu : "il vit que cela était très bon" ! C’est aussi le cri de joie de l’homme découvrant la femme tirée de son côté, à la fois si proche – "la chair de ma chair" – et si différente – ce qui en elle lui manque désormais et qu’il n’aura de cesse de désirer en une autre que lui-même. La différence, loin d’être une menace, devient alors une chance pour la relation, provoquant chacun à l’accueil du mystère de l’autre et de son regard sur le monde. Devenir vraiment humain, c’est ainsi chercher à devenir l’un par l’autre plus homme, plus femme, plus soi-même dans tout ce qui fait sa vie, spécialement dans une relation amoureuse.


Oui, elles sont bonnes, ces deux manières d’être au monde que vivent l’homme et la femme : dans le déploiement de chacune d’elles et dans l’accueil mutuel, ils découvrent ce qu’ils peuvent mutuellement s’apporter et s’émerveillent de la beauté de l’autre qui se révèle dans des moments étoilés. Ils sont bons, cette attirance et ce désir mystérieux qui s’éveillent en nous devant notre vis-à-vis masculin ou féminin : ils nous ouvrent radicalement à autrui et ont la puissance d’éveiller en nous le meilleur de nous-mêmes. Elle est bonne, l’aventure dans laquelle entrent l’homme et la femme qui s’engagent l’un envers l’autre pour la vie. « Quittant père et mère », ils entrent dans une vocation de communion et sont promis, de tant de manières, à une fécondité qu’ils n’imaginent pas : en cela, ils poursuivent la création de Dieu. Il nous faut rendre grâce : Dieu a créé l’homme et la femme pour trouver, dans la reconnaissance mutuelle, dans une relation aimante et une vie assumée ensemble, le dynamisme et la fécondité de leur vie.


C’était au paradis. Mais ce paradis est en réalité devant nous : il dit notre vocation. Dans le quotidien, nous en faisons l’expérience, nos relations sont blessées. Bien souvent, au milieu d’éclairs de joie, apparaissent la volonté de dominer ou de posséder, des silences s’installent ou des paroles empêchent d’écouter, des incompréhensions, des rancœurs ne pardonnent pas, parfois l’échec... L’astuce de l’homme est forte alors pour dégager sa responsabilité : il trouve des accommodements face à l’exigence de cette vocation à la communion. Ainsi des pharisiens de l’évangile qui, en invoquant des interprétations anciennes, s’arrogent des droits, qu’ils refusent d’ailleurs aux femmes. Mais Jésus rappelle le projet initial de Dieu : "Ce que Dieu a uni, que l’homme ne le sépare pas". Comment comprendre cela ?


La question à laquelle Jésus répond concerne le divorce. Alors qu’aujourd’hui, tant de couples sont en difficulté ou en rupture, tant de familles en recomposition, et le mariage lui-même mis en question, la réplique de Jésus semble sans appel : nous pensons peut-être qu’il fait de la fidélité dans le mariage une loi inexorable. Non, c’est bien autre chose : c’est une parole d'espérance, quels que soient les échecs humains. La fidélité, ce n'est pas de chercher à maintenir un état de fait ou une unité de façade. C'est inventer les attitudes qui, au travers des habitudes, des crises et même des reniements, renouent et tissent inlassablement les liens, et donnent à la relation sa chance de porter tous ses fruits. Et c’est retisser, autrement, dans une autre histoire parfois, cette unité si désirée et manquée. Nous nous rappelons aussi cette parole de Jésus : « Je ne suis pas venu pour les bien-portants, mais pour les malades ».

naissons qu’il y a encore du chemin à faire pour que se développe cette unité-là dans nos relations, dans notre société, jusque dans notre Église.


Jésus nous appelle donc aujourd’hui, dans ce qui nous constitue hommes et femmes, à accueillir le Royaume de Dieu « comme un enfant ». Sans doute est-ce un appel à reconnaître ce qui doit grandir en nous, à développer notre capacité d’accueil de l’autre, dans le couple et dans toutes nos relations, et à en appeler à Dieu dans la confiance. Lui seul peut nous éclairer et nous aider à accomplir ce projet inscrit dans nos destinées et à lui donner toute sa fécondité : « Ce que Dieu a uni, que l’homme ne le sépare pas ».


Bernard Thomasset, sm Homélie du 3/10/2021








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