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Au commencement était le Verbe

La liturgie catholique nous propose le jour de Noël ( ainsi d’ailleurs que le 31 décembre ) de réentendre le prologue de saint Jean qui, de façon très solennelle, nous remet en perspective dans le projet initial du Créateur « Au Commencement était le Verbe et le Verbe était Dieu » pour éclairer la mission du Christ Sauveur, « lumière née de la lumière », et nous aider à relire notre propre existence « Tous nous avons eu part à sa plénitude, nous avons reçu grâce sur grâce ».

En cette année 2019, il me faut avouer que j’attendais avec impatience ce jour de Noël. J’en avais fait un jalon dans le calendrier de mon existence. En effet, fin octobre, à cause d’une mauvaise chute sur le cours Lafayette, je m’étais brisé le fémur à trois endroits dont le col, avec ce qui en découlait: opération chirurgicale, pose d’une prothèse de hanche, séjour dans un centre de rééducation fonctionnelle et diminution conséquente de mes activités ministérielles de diacre.


Je fredonnais chaque matin, pendant tout le temps de l’Avent, un chant populaire provençal de Saboly, appris pendant mon enfance à Fréjus pour préparer la crèche vivante de la nuit de Noël «la gambo mi fa maù».. « la jambe me fait mal». C’est un petit cantique chanté par un jeune berger handicapé qui s’inquiète de ne pas pouvoir se rendre à Bethleem car sa jambe est abîmée. Il insiste tellement que les autres bergers suggèrent qu’on selle son cheval pour le transporter, car il affirme « qu’en voyant l’enfant Dieu dans la crèche, il retrouvera la force de marcher»! Je finis par m’identifier à ce berger à force de murmurer sa complainte et toutes mes séances de Kiné à Pomponiana ont été les meilleures antiennes de l’Avent pour préparer ce Noel 2019. Dans ce contexte une jeune kiné roumaine a été comme une accompagnatrice spirituelle pendant les séances de rééducation. Grâce à elle la chair s’est faite Verbe. Très vite, elle m’a dit avec une douce autorité : « Si vous voulez réapprendre à marcher, cesser de vous focaliser sur la chute et la peur de retomber car cela ne peut qu’engendrer de la peur. Pensez à comment vous marchiez avant la chute. Et pour l’instant, essayez de regarder en face de vous, sans trop fixer vos pieds. Faites un pas, encore un pas en fixant plutôt l’horizon loin devant,...et vous verrez vous allez bientôt remarcher ». À sa manière, Alexandra parlait un peu comme St Jean « Au commencement était le Verbe et le Verbe était la vraie Lumière »

Que de fois n’avais je pas entendu dans des sermons que Noël était d’abord la réponse du Ciel à la chute originelle de l’humanité, que de fois n’avais je pas souffert de commentaires douteux qui remuaient le couteau dans la plaie du péché et du mal pour justifier la venue d’un Sauveur? Grâce à ma jambe cassée, grâce à ma kiné roumaine et à ses soins, je réapprenais à marcher cette année en retrouvant des motifs d’action de grâces pour chaque pas accompli, si petit soit- il. Et dans une exaltation intime, je réalisais en mon for intérieur que le Salut est une proposition qui nous est adressée depuis toute éternité. Le problème essentiel du refus de cette proposition c’est comme le disait St François d’Assise en pleurant « l’Amour n’est pas aimé »...ou St Jean, lui-même « Il est venu chez les siens et les siens ne l’ont pas reconnu ». Quand la Vierge Marie, au jour de l’Annonciation, a répondu « oui» à l’Ange de Dieu, quand elle s’est rendue disponible « pour que tout advienne selon Sa Parole » elle réhabilitait la beauté du Commencement: « Au Commencement était le Verbe.. » Elle qui « était plus jeune que le péché » selon la belle expression du poète, ne se préoccupait pas de la chute originelle: elle venait tout simplement réapprendre à l’humanité, à l’Eglise, à refaire un pas, encore un pas sur le chemin du Salut en fixant l’horizon sur quelque chose d’inouï : une Eglise enfin réconciliée avec elle-même, avec le message dont elle est porteuse, réconciliée avec l’amour gratuit… Une immaculée conception de l’Humanité, voulue par Dieu dès l’origine du monde. C’est peut être aussi cela l’esprit mariste: se laisser entraîner de commencement en commencement par Celle qui est la première en chemin...et qui reste ND de l’Espérance. Marie, la plus belle des figures de l’Eglise, nous aide à comprendre ainsi que notre juste place de disciples de Jésus est de rester avec Lui présents sur les lignes de fractures de la société, là où l’on en viendrait à désespérer de la grâce et du projet d’Amour de Dieu pour tous les blessés de la vie et toutes les victimes des chutes les plus absurdes soient elles, aux quatre coins du monde. Qu’importe si nous boitons encore un peu sur ce chemin: notre père le patriarche Jacob gardait dans son propre boitement la trace du combat avec l’Ange de Dieu et le signe joyeux de sa victoire intérieure pour faire la vérité sur lui-même et sa relation avec les autres! L’important est de se redire chaque matin comme un point de météo spirituelle non pas «La jambe me fait mal» mais l’évangile du jour de Noël «Au commencement était le Verbe...et le Verbe était Dieu.. Il était la Vraie Lumière » Alors tout s’éclairera chaque matin de 2020. Bonne et sainte année à tous et à chacun. Diacre Gilles Rebèche

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